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Chloé Quenum. FOOOOSSSIIILLLE




Une installation intrigante et évolutive. Une nature morte bien vivante. Une interrogation sur le naturel dans l’art. Un jeu de l’esprit. Galerie Saint-Séverin < 24-06-18

Chloé Quenum fait partie des artistes qui, tels Cézanne, Matisse, et surtout Gauguin, découvrant un autre territoire, une autre lumière sont fascinés par ce qu’ils trouvent et font basculer leur pratique. Partie en résidence en Nouvelle-Zélande pour étudier les écritures sur des tissus, elle a été happée par la diversité des paysages, l’omniprésence et la générosité de la nature.

L’exposition de cette artiste, anthropologue et curieuse de tout, en témoigne et questionne visuellement des catégories usuelles dans l’art, de manière sous jacente.

Chloé Quenum s’est saisie de fruits colorés tels des citrons, oranges ou grenades, les a recouverts d’argile bleue et les a installés sur un fond bleu, les faisant passer à l’univers du monochrome et faisant disparaître leur singularité de couleur.
En ne gardant que leur forme approximative, elle a recréé un paysage mental et symbolique.

L’installation, qui a les traits d’une nature morte a été ensuite « laissée à sa vie » d’œuvre ; le soleil de printemps faisant son travail a provoqué le séchage rapide de l’argile et son éclatement.
Si les craquelures des tableaux sont habituellement craintes, celles de l’argile sont ici recherchées et créent, ici, l’œuvre. La nature morte est devenue vivante, a repris de la couleur, celle des fruits.
La seconde peau, l’argile, a laissé apparaître de manière pudique et poétique la première, celle des fruits. Le paysage est devenu mobile comme en Nouvelle-Zélande.
Les fruits, toujours bien vivants, occupent la place des fossiles, ces traces de vie préservées dans des roches sédimentaires qui se sont formées avant la période géologique actuelle. Chloé Quenum se fait paléontologue du présent de l’art.

Cette nature morte n’est pas si morte que cela ! Et cette œuvre réalisée par une artiste éprise de sciences sociales soulève bien des questions :
• Une œuvre peut-elle évoluer ou doit-elle être figée dans le temps ?
• Qu’est-ce qu’exprimer le naturel en art ? Et si le naturel reprenait parfois la main loin de la fonction première de l’art : la représentation ?
• Ne peut-on pas faire un lien entre cette manière artisanale de fabrication d’une œuvre et ces nouvelles technologies où vous passez votre smart phone devant une œuvre et révélez l’avatar qu’elle contient (cf. exposition ORLAN ?

Jean Deuzèmes

Présentation de l’œuvre par la commissaire Alicia Knock
« Foooooooossssiiillllle, paysage mobile et champ lexical, surgi de son expérience récente en Nouvelle- Zélande, où la diversité des paysages éprouve constamment la mobilité de l’habitant. Les forces vives qui secouent cette nature brute -"soleil sans filtre"- déploient ici une écriture intérieure complexe, où une tectonique se met en place entre le réel et l’imaginaire. Dans ce collage précaire et intimiste, les objets ponctués dans l’espace sont autant de collisions de souvenirs et de mémoires. Au-delà d’une expérience de l’ailleurs, ce paysage offre ainsi une expérience aléatoire et sensible du dedans, dans l’espace transitionnel de la vitrine, entre espaces intime, public, civique et religieux.

"Océan-roche-forêt. Tout est mouvant devant la mer"
Imprégné d’anthropologie, d’histoire des techniques et de poésie, le travail de Chloé Quenum opère des glissements lexicaux et visuels sous forme d’assemblages qui reconfigurent l’origine comme la géographie d’objets ou de situations.

"J’ai vu, dans mes yeux faits de membranes sensibles, de gelées transparentes et de rayons, mes yeux baignés d’humeurs et de lumières, j’ai vu des étendues pleines d’espace, de dessins, de plans colorés, et d’autres choses, indicibles avec des mots ; — sans que jamais imaginées telles..." Victor Segalen, Équipée.

"Cette tresse, on la nommait « Origine-du-verbe », car elle semblait faire naître les paroles. Térii comptait la négliger bientôt : remâchés sans relâche, les Dires consacrés se suivraient à la longue d’eux-mêmes, dans sa bouche, sans erreur et sans effort, comme se suivent l’un l’autre en files continues les feuillages tressés qu’on lance à la dérive, et qu’on ramène, à pleines brasses, chargés de poissons miroitants." Victor Segalen, Les immémoriaux.

Alicia Knock

Chloé Quenum est née à Paris en 1983, où elle vit et travaille. Diplômée de l’École nationale supérieure des beaux-arts (ENSBA) de Paris et de l’EHESS en anthropologie de l’écriture, elle a notamment montré son travail dans des expositions personnelles et collectives à Paris, Marseille, Strasbourg ou encore Los Angeles. Elle a été nommée en 2013 au 15e prix de la Fondation Ricard ‘ La vie Matérielle ‘.Elle a travaillé sur des vitraux. Elle expose à la galerie Joseph Tang à Paris. Elle a reçu une bourse de soutien pour une recherche/production artistique du CNAP.

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Une exposition visible jour et nuit, du 18 mai au 24 juin 2018, 4 rue des Prêtres-Saint-Séverin, Paris 5e.

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