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Mounir Fatmi. Galerie Yvon Lambert

jeudi 6 février 2014

They were blind, they only saw images

Galerie Yvon Lambert 30 janvier - 28 février 2014

Mounir Fatmi est un artiste marocain de renommée internationale auquel V&D a déjà consacré deux articles.

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Lire 25 ans de créativité arabe

À l’aide de vidéos, d’installations ou de performances, explore les paradoxes de la représentation du sacré. Il questionne les identités et les manières de croire en s’appuyant sur les textes mystiques du soufisme, Spinoza jusqu’aux écrits controversés de Salman Rushdie.

Connaissant bien les interdits de la représentation publique, il travaille les images pour suggérer et questionner le sens.

L’exposition Yvon Lambert, la première de l’artiste dans cette galerie présente des travaux récents très différents

Deux œuvres sont particulièrement significatives :

" La Divine Illusion", se présente de loin comme une boîte de plexiglas maculée d’encre noire et cachant pour partie ce qui y est déposé. Au premier regard, elle laisse perplexe. Mais s’impose rapidement l’analogie avec la Kaaba de la Mecque, de forme ici non pas cubique, mais parallélépipédique, pour ne pas être dans l’illustration. À l’intérieur, sept livres sacrés - Bibles, Corans, etc. - que l’œil découvre : Chacun est maculé lui aussi d’unetache d’encre noire plus ou moins symétrique : des tests du Rorschach réalisés en refermant les livres ! L’artiste aborde ainsi frontalement la question de l’interprétation de ces textes et la renvoie à la découverte du lien avec l’inconscient de chacun. Le titre ne cache pas le doute instillé par l’œuvre. Lire, méditer, c’est aussi découvrir le tréfonds de soi.

« Jusqu’à preuve du contraire » est une installation composée de néons lumineux sur lesquels sont retranscrites les phrases de la sourate 24 du Coran s’intitulant « Lumière ». Elle fonctionne comme une source hypnotique qui force le regard. Ce n’est plus l’oreille mais l’œil qui reçoit, qui se souvient du Sacré contenu dans l’écrit et l’œuvre. Ici la sourate rayonne physiquement sur l’espace qui l’entoure et donc, symboliquement, sur le monde. L’interprétation se fait visuelle, mais comme le texte (en arabe ou en anglais) est écrit par fragments, on n’en comprend pas l’ensemble, à moins de le connaître par cœur. Alors ce n’est plus le contenu du texte qui compte mais la forme de l’installation : une élévation rayonnante. Finalement, on n’est pas éloigné de la représentation talmudique précédente : l’émotion éveille au texte, invite à le relire.

Une question déjà posée dans une exposition précédente « Néon » de 2012 (Lire V&D) surgit. Que se passe-t-il lorsqu’on éteint l’installation ? Que reste-t-il de la valeur de l’émotion menant à l’interprétation ? Le néant ou le souvenir ? La lumière, « jusqu’à preuve du contraire » comme l’insinue le titre ?

Jean Deuzèmes

Présnetation de la galerie

L’exposition s’ouvre sur la projection de la vidéo Sleep Al Naim consacrée pour Mounir Fatmi à l’auteur Salman Rushdie ; référence formelle au film expérimental réalisé par Andy Warhol en 1963 présentant le poète John Giorno endormi. Dans l’impossibilité de rencontrer l’écrivain britannique, Mounir Fatmi utilise ici les nouvelles technologies de l’image afin de symboliser le statut contradictoire de l’auteur, dans son sommeil, entre vulnérabilité et force tranquille.

Who is Joseph Anton ?, œuvre également inspirée par la figure de Rushdie, démontre l’intérêt de Mounir Fatmi autour du concept de portrait-robot. Pour cette œuvre, imprimée au jet d’encre sur miroir, il utilise comme prétexte le pseudonyme de Salman Rushdie — Joseph Anton — composé des noms des auteurs Joseph Conrad et Anton Tchekhov. Par la construction d’un portrait unique à partir des visages des trois écrivains, Mounir Fatmi concrétise visuellement pour le spectateur une identité nouvelle, celle du fugitif.

Aussi, la sculpture performative Le Paradoxe de l’unicité met en scène une machine à remouler obsolète, référence à l’œuvre emblématique de Malévitch, l’Aiguiseur de couteau de 1912 marquant le passage de la figuration au suprématisme et l’abstraction. Ici, des morceaux de calligraphie arabe seront aiguisés puis dispersés autour de la machine et se feront les représentants d’une écriture arabe antérieure à la révélation du texte sacré du Coran. Libéré ainsi de sa forme écrite, le texte religieux retrouve son abstraction potentielle abandonnant sur le sol le dogmatisme engendré par l’écriture. »

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